Login

Retard à l’allumage pour le « carbon farming »

Faire de l’agriculture un pilier de la transition de nos économies est une démarche prometteuse, mais qui doit encore surmonter plusieurs obstacles.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

Utiliser l’agriculture comme un levier de réalisation des objectifs de réduction des émissions de gaz à effets de serre et ainsi atténuer l’impact climatique du secteur qui est le troisième émetteur. C’est la grande promesse du « carbon farming », qui consiste à monétiser le stockage de carbone dans les sols agricoles par des crédits. Cette démarche se concrétise aujourd’hui en termes de volonté politique. L’Union européenne s’est fixé un objectif d’absorption nette de 310 Mt équivalent CO2 dans les puits de carbone naturels d’ici 2030. En France, le gouvernement s’est doté du dispositif « Label bas carbone » afin de pouvoir piloter des projets en générant des crédits carbone. Différentes méthodes agricoles ont été labellisées dans ce cadre ces dernières années. Les agriculteurs français seraient ainsi déjà 10 % à être intégrés d’une manière ou d’une autre dans ces démarches, selon notre enquête Agrodistribution-ADquation (voir ci-contre).

Pas de fausses promesses

« Il existe déjà en effet des projets et donc des préfinancements versés aux agriculteurs, même si les crédits ne seront réellement générés qu’au bout de cinq ans sur la base de changements de pratiques réels et vérifiés, confirme Édouard Lanckriet, directeur du pôle bas carbone chez Agrosolutions. Cependant, c’est à la fois coûteux et complexe pour le secteur. » Même si des possibilités de financement existent effectivement sur le marché volontaire du carbone. « En croissance exponentielle, il pèse actuellement pour environ 2 Mds$. Tout l’enjeu est d’en capter une partie, sachant que l’agriculture ne représente encore que 0,5 à 1 % de ce marché volontaire. Même si nous pouvons collectivement être fiers du chemin déjà parcouru, notamment pour concevoir des méthodes robustes de certification, il reste encore du chemin pour adapter la finance carbone à l’agriculture. »

Plusieurs freins sont à lever dont le coût des méthodes de mesure et l’insuffisance des prix des crédits carbone pour financer le coût réel des pratiques bas carbone. Le cumul avec d’autres sources de financement (biodiversité, mesures climatiques de la Pac, financements de l’agence de l’eau…) est à promouvoir pour que ces paiements soient véritablement déclencheurs de transition. « Il ne faudrait cependant pas faire de fausses promesses aux agriculteurs sur les revenus à attendre du carbone. » Ces derniers ne s’y trompent pas. Selon notre sondage, s’ils sont 42 % à penser globalement que la vente de crédits carbone peut être une source de revenus complémentaires, seulement 9 % y croient formellement. « La finance carbone est à mon sens surtout une opportunité à saisir pour aider les agriculteurs à réduire le coût d’une transition des pratiques qui apparaît comme inéluctable », conclut le spécialiste.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement